Macchabée dans le frigidaire

Witz zum Thema Vegetarismus/vegetarisch

von  Roger-Bôtan

Un monsieur cultureux, l’un de ceux qui méritent
d’être considérés comme cosmopolites —
du fait qu’à la maison ils portent des babouches —
et sa petite amie, vraie Kazakhe de souche,
pour se désemmerder, un jour organisèrent
chez eux une soirée costumée. Pour ce faire
ils invitèrent tous leurs amis et voisins
et des gens inconnus — cousines et cousins.
Pendant qu’ils guinchaient, l’hôte, en fringues médiévales,
et sa jolie copine ont dû quitter la salle
pour des affaires qui étaient sans intérêt
pour les conviés. Bientôt l’hôte réapparaît
devant la compagnie, mais en bras de chemise
(il faisait plutôt chaud). La société surprise
demande : — « Où avez-vous laissé votre casaque ? »
Il leur répond ainsi, pensant à sa Kazakhe :
— « Bof ; si je ne me trompe, elle est dans la cuisine. »
— « Mais pourquoi faire ? — dit une sienne cousine, —
Pourquoi pas dans l’armoire ou dans la penderie ? »
Lui voit dans la question une plaisanterie
et réplique en souriant : — « Là-bas pas de cheval —
de toutes les raisons c’est ça la principale. »
Les convives s’écrient : — « Quelle idée farfelue !
Puisqu’il n’y en a pas dans la cuisin’ non plus ! »
— « Si ! » — leur répond le maître, et tout le monde rit :
— « Ah bon ! votre cuisine est comme une écurie !
Puisqu’elle a pour cela suffisamment d’espace ! »
— « Elle est modeste, mais tout y trouve sa place, —
dit l’hôte, — le cheval, on le fout au frigo,
où l’on met, à part ça, d’autres trucs à gogo. »
— « Quel immense frigo ! Ça fait combien de temps
que le pauvre animal est fourré là-dedans ? »
Le maître dit : — « Au moins deux mois, peut-être trois. »
— « Mais alors le cheval doit être mort de froid ! » —
hurlaient les braves gens, terrifiés, alarmés.
Il essaya tant bien que mal de les calmer :
— « Il était déjà mort beaucoup de temps avant. »
— « Avant d’y être mis il n’était pas vivant ? »
— « Pas plus qu’après… » —Voyant qu’ils ne bitent que tchi,
il a dû recourir à une analogie :
— « Et vous, si vous aviez été égorgés vifs,
étripés, déchirés en de menus morcifs,
vous, si l’on vous avait retiré votre peau,
cuits, fumés et fourrés dans vos propres boyaux,
franchement, quoi, alors, vous n’en seriez pas morts ?
Croyez-vous qu’aujourd’hui vous vivriez encore ? »
Ils l’interrompent : — « Bon ! nous avons comprendu !
La bête et sa carrière hippique, c’est foutu !
Ce n’est plus qu’un boudin fumé, de la barbaque.
Mais pourquoi laissez-vous traîner votre casaque
là, dans la même pièce, où vous gardez la viande
du malchanceux cheval ? » — « Puisqu’elle en est friande
et qu’elle en a besoin pour ne point rétrécir ! »
— « Ah bon ! ce saucisson régénère le cuir !
C’est donc grâce à la graisse et à la chair équestre
qu’elle ne vieillit pas ! C’est pour ça qu’elle reste
toujours si belle à voir, si lisse, molle et fine ! »
— « C’est la coutume dans son pays d’origine. »
— « Comment ! en Italie on fait cela aussi ? »
— « Non pas en Italie. Elle provient d’Asie. »
— « Ah bon ! alors, c’est quoi ? une contrefaçon ? »
— « Mais non, là, tout est vrai : Kazakhe et saucisson ! »
Un mec bossant pour la police scientifique
s’offre alors pour tester si elle est authentique.
Il sort de sa profonde un canif et un sac
en plastique et lui dit : — « File-moi la casaque !
Je vais en découper trois ou quatre lambeaux
et les analyser à donf dans mon labo ! »
— « Quoi ? tu délires grave ! as-tu perdu l’esprit ? »
— « Elle t’a coûté cher ? Tu as payé quel prix ? »
— « Pas un rond. » — « Mais alors d’où vient ta répugnance
à la voir dépecer au profit de la science ? »
Le maître de maison, ayant entendu ça,
s’indigna, eut la chair de poule et s’empressa
de tous les congédier et finir la party.
À peine le dernier des hôtes fut parti,
que sa compagne entra, s’essuyant la clapette
dégouttant de charogne avec une serviette,
et demanda pourquoi il avait éconduit
tout le monde. — « Ils étaient trop bourrés, — a-t-il dit. —
Surtout ce fou de flic sadique qui propose
de te couper pour voir si tu es vraie ou fausse. »
Sa copine opina : — « À l’avenir mieux vaut
leur dire que je suis un plagiat ou un faux.
J’aime mieux être un faux, mais intact et entier,
qu’une authenticité partielle et entaillée. »

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Kommentare zu diesem Text

majaja (28)
(24.03.13)
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 Roger-Bôtan meinte dazu am 06.04.13:
C'est juste pour déconner, rien de très profond. Le lyrisme poétique n'est pas mon truc.
majaja (28) antwortete darauf am 06.04.13:
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 Roger-Bôtan schrieb daraufhin am 07.04.13:
J’ai toujours été de cet avis, je ne peux m‘empêcher de ricaner en voyant des auteurs qui prennent leurs écrits très au sérieux. Les lettres et tous les arts c’est que la déconne, un amusement d’esprit – voilà tout.

 Mélan_Colie (15.07.14)
J'ai pris un plaisir sans égal à lire ton texte ! Merci beaucoup de le partager avec le monde.

 Roger-Bôtan äußerte darauf am 10.08.14:
Certains pensent que j’ai écrit ça pour faire marrer les gens, tandis qu’en vérité mon intention avait été, tout au début, de vilipender les pratiques carnivores des bipèdes parlants.
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